• Notre chronique sur l'histoire des Spahis se conclut par la présentation du parcours du Compagnon de la Libération Michel ABALAN (1920-2000), grâce à des archives  inédites, communiquées par sa famille (photographies et extraits de ses Carnets de Guerre [1]. Ce document exceptionnel sera disponible en PDF la semaine prochaine dans notre rubrique Publications. 

     

    Michel ABALAN, un spahi FFL, du GRCA au 1er RMSM

     

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     

    Son évasion, son engagement en juin 1940

     

    Michel ABALAN est né à Brest le 5 juin 1920. En 1940, il est en 1ère année de préparation militaire supérieure et passe le concours d'admission à Saint-Cyr au mois de mai. Devant l’avancée allemande, après avoir cherché différentes solutions d’embarquement à partir du 17 juin, il réussit le 19 Juin à 2 heures du matin à embarquer pour l’Angleterre à Argenton (Finistère), avec quelques camarades et des militaires français, sur une vedette des Ponts-et-Chaussées à destination de l'île d'Ouessant [2].

    Le lendemain, ils sont transbordés  sur le charbonnier Mousse Le Moyec. 

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    A bord du Mousse Le Moyec, le 20 juin 1940 - Copyright  Alain Le Floch

     

    Carnets de Michel ABALAN : « Le convoi a appareillé au lever du jour. Le commandant a fait savoir alors que la destination était Plymouth. A I7 h 30, le Mousse Le Moyec était à l'ancre avec d'autres navires dans une petite baie à l'Ouest de Plymouth. Après une nuit à bord, la quarantaine de civils transportés a pu débarquer. Nous avons passé la nuit du 21 au 22 Juin à Plympton près de Plymouth, dans un centre d'accueil très bien organisé. Le 22 nous avons été transportés de Plympton à Londres et hébergés à Anerley Residential School, école désaffectée, centre de réfugiés de France ».

     

    Michel ABALAN s’inscrit comme volontaire FFL auprès du Capitaine Bergé, à Residential School, le 29 juin 1940 :

    Carnets : « Le 29 Juin nous y avons appris par le capitaine Georges Bergé, venu au centre en uniforme, la formation prochaine des « Forces Françaises Libres » pour lesquelles je me suis fait inscrire.

    Nous avons quitté Anerley Residential School le 2 Juillet pour aller à l'Empire Hall où j'ai été incorporé le 11 juillet au Bataillon de Chasseurs. »

     

    C’est à l’Empire Hall à Londres que Michel Abalan signe un engagement provisoire dans les Forces Françaises Libres. Sa signature figure sur ce document :

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     "Trésors d’archives, exposition virtuelle » – Fondation Charles de Gaulle et Archives nationales (2015)

     

    Il rejoint ensuite le Bataillon de Chasseurs au camp de Delville, où il régularise son engagement le 24 septembre 1940.

    Louis Tritschler : " Nos cadres chasseurs, sans nul doute, comptent nous conduire au feu le plus rapidement possible. Ils feront tout pour faire de nous une troupe d'élite, une troupe bien dressée ; ils savent aussi qu'ils y parviendront mieux en exaltant notre volonté plutôt qu'en brisant notre enthousiasme. Seul le désir d'aller au combat, et donc la volonté de devenir de vrais combattants, nous feront jeter notre cœur dans les exigences de l'instruction, la fatigue des exercices, leur monotonie, les duretés de la discipline et les rigueurs de la vie de camp. Personne ne paraît songer à notre avenir ; en particulier pas de celui des élèves des Grandes Écoles. Pourtant n'en a-t-on pas fait, dès l'engagement, le recensement des candidats, que de Gaulle, le 19 juillet, venu passer en revue à Delville camp le bataillon de Chasseurs, se fait présenter ; ce qui l'amène, après avoir entendu neuf fois répondre à sa question sur la corniche d'appartenance : "de la Corniche de Brest, mon général !" à s'exclamer : " Mais toute la Corniche de Brest est donc ici ! " Nous étions neuf : Kerjean, embarqué avec moi sur l'Abeille 4, Abalan, parti d'Argenton sur Le Conquet [3] puis Ouessant, Podeur, Coutanceau, Loncle, Loaec, Le Roux, Chevallier et moi-même." [4]

    Delville Camp était un camp de l’armée canadienne prêté aux Français entre les mois de juillet et de septembre 1940. Les Chasseurs furent ensuite logés dans des villas du petit village de Camberley à proximité d’Aldershot durant tout le mois d’octobre 1940, en attendant la construction d’un camp pour les FFL à 2 kilomètres au Nord de Camberley, qui s’appellera Old Dean Camp, à partir de novembre 1940 et qui allait demeurer le camp des FFL durant toute la guerre.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    1940 - Nettoyage des camps de Morval

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Le champ de tir de Delville Camp

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Roger Podeur et Michel Abalan

     

    Jean-Mathieu Boris : "Delville Camp, situé près d’Aldershot, la ville de l’armée britannique, est en réalité double, car il jouxte son jumeau, Morval Camp ; en fait, autour d’un « parade ground » de belle taille, s’alignent des baraques en bois toutes pareilles extérieurement. La plupart servent de dortoirs où s’alignent 24 personnes, d’autres de douches ou de réfectoires, mais le plus étonnant sont les WC : 12 sièges faisant face à 12 autres sans aucune cloison, plus question de pudeur !"

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Les huts  (baraques) de Old Dean Camp

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    1941 Old Dean Camp - Etude devant la "hut" . Michel Abalan  est à droite 

    [1]  L’ensemble des Carnets de Guerre de Michel Abalan couvre la période du 15 juin 1940 au 20 septembre 1945 (à l’exception de la période de voyage maritime et terrestre entre l’Angleterre et le Liban et de la période de formation de la 2ème DB au Maroc).

    [2]  Michel Abalan n’avait pas alors pas encore eu connaissance de l’Appel du 18 Juin lancé par le général de Gaulle…

    [3]  Erreur : il n’est pas passé par Le Conquet

    [4]  Vanités, ou Les Souvenirs de guerre d'un jeune Français Libre de Louis Tritschler.

     

     

    En Afrique Équatoriale Française (1941)

     

    A l’été 1941, la majorité des volontaires d’Old Dean Camp rejoignent l’Afrique Équatoriale Française Libre. Michel ABALAN embarque le 30 août 1941 à destination de Pointe-Noire où il parviendra le 2 octobre suivant, au terme d’un périple que relatent les mémoires de son camarade Louis Tritschler :

    Les Élèves Aspirants quittent le Camp d’Old Dean et rejoignent par le train Liverpool pour embarquer sur le Northumberland, un cargo de 12 000 tonnes qui fait partie d’un convoi de transport de troupes. Pour des raisons de sécurité militaire les différentes destinations restèrent inconnues d’eux (M. Abalan). Ils arrivent à Freetown où le Northumberland reste trois jours avant de rejoindre, en trois jours, le port de Takoradi en Gold Coast. Le navire y stationne vingt-quatre heures puis rejoint Lagos en deux jours. Le bateau repart ensuite pour franchir l’Équateur et arriver à Pointe-Noire où les Élèves Aspirants restent quelques jours dans un camp de transit.  Ils quittent Pointe-Noire par le train Congo-Océan qui les achemine de nuit jusqu’à Brazzaville.

    Avec le grade de caporal, Michel ABALAN est alors affecté aux Spahis, et intègre la formation de la Compagnie d'élèves aspirants du Bataillon du Pool à Brazzaville, plus connu sous le nom de camp Colonna d’Ornano. Le Lieutenant Doucet est leur Chef de Section.

    Mais moins de deux mois après, le stage est arrêté : tous les Français de souche stationnés en A.E.F. doivent être dirigés vers le front du Levant.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Chambre des élèves à Brazzaville - Archives Emile Pagliantini/ Alain Boussuge 

     

    Le 16 novembre 1941, ils repartent en train sur Pointe-Noire par le Congo-Océan et embarquent sur Le Chantilly, un cargo-mixte de 10 000 tonnes, qui rejoint Le Cap (Cape Town) en un peu plus d’une semaine.  Après une semaine passée au Cap, ils prennent le train pour Durban où ils sont transférés sur le Dunera, paquebot conçu comme transport de troupes. Après une rapide escale à Aden, ils arrivent à Suez le 19 décembre, d’où ils prennent le train et, après une escale à Ismaïlia sur le Canal de Suez, ils arrivent au Liban où ils passent la fin de l’année 1941 à Beyrouth au Dépôt des Troupes du Levant (D.T.L.). Michel ABALAN note dans ses carnets : « Je suis resté 8 jours dans l’incertitude et j’ai appris que j’étais envoyé aux escadrons de Spahis qui étaient basés à Damas. »

     

    Au Levant et en Égypte au sein du G.R.C.A. (1942)

     

    Michel ABALAN est affecté au G.R.C.A. le 20 décembre 1941 avec le grade de brigadier.

    Depuis la fin des hostilités au Levant et la signature de l’armistice en juillet 1941, le 1er escadron de spahis marocains créé par Paul Jourdier, enrichi de nouveaux escadrons, s’est en effet structuré au sein de deux Groupes de reconnaissance de corps d’armée (G.R.C.A.).

    Le 15 janvier 1942, les élèves aspirants quittent Beyrouth pour rejoindre Damas en Syrie.

     

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    1942 - Michel Abalan à Damas

     

    La plupart des élèves sont affectés au 3ème escadron au Quartier Maradas tandis que Michel ABALAN est lui, affecté au 2ème escadron à Hamidieh où il poursuit sa formation militaire. Mais le 2ème escadron est dissous à la suite d’une révolte de quelques soldats indigènes qui tuent sept spahis : Sylvain Levesque, Roger Bestiel de Montval (ou Monval), Félix Bitton, Roger Landre, Léon Kornic, Marcel Jacquet et Djimia. Quatre des soldats révoltés sont jugés et fusillés.

     

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     Sylvain Levesque et Roger Nordmann à Brazzaville en mars 1941 - Famille Nordmann

     

    Le 11 avril 1942 au matin, Michel ABALAN reçoit l’ordre de partir à Beyrouth en camion avec le groupe de Transmissions du 1er escadron.

    Une douzaine de jours plus tard survint un événement qui faillit changer son destin de spahi : « Mercredi 22 avril le Pel. N°2 de T. nous rejette au B.M.3. Je rejoins cette unité ».

    Le lendemain, il quitte Beyrouth avec le B.M. 3 et ils gagnent Haïfa. Le 23 avril, poursuivant leur route, ils parviennent dans le désert aux environs de Marsa-Matrouh.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Avec le BM 3  

     

    Carnets -  Lundi 27 avril 1942 : « allés à l’E.M. pour nos affectations. Demarle [1] et moi voudrions quitter les Spahis peu sympa, pour le B.M.3. »

    Vendredi 30 avril : « Demarle et moi sommes affectés au B.M.3 ... Vendredi 1 mai …. Demarle et moi sommes appelés au 1er Bureau où un camion de spahis vient nous prendre ainsi que Marty et Galin [2] « Sermon réprobateur de de Villoutreys qui a réussi à nous accrocher. »

     

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    1942 - Michel Abalan et Jacques Demarle à Araya

    L’épisode du B.M. 3 étant clos, les spahis quittent Marsa Matrouh le vendredi 8 mai et arrivent le jeudi 14 à Mena Camp au pied des Pyramides, puis ils sont dirigés le 18 mai sur le centre d’instruction anglais d’Héliopolis.

    Michel ABALAN va alors participer successivement aux campagnes d’Égypte jusqu’au 18 décembre 1942, et de Libye, du 19 décembre 1942 au 1er mars 1943.

    A cette époque, les Groupes de reconnaissance effectuent des missions de défense, puis ils rejoignent à l’été les environs du Caire où ils sont enfin équipés de matériel britannique.

    Michel ABALAN est dirigé le jeudi 2 juillet 1942 vers le Caire : « 5 juillet… je suis maintenant radio au P.H.R. du 1er G.R. … départ de l’escadron... le convoi des A.M. était imposant », et ensuite sur différents lieux dans les environs du Caire. (Béni-Youssef, à 10 km, puis à 20 km au sud des pyramides de Gizeh pour la protection d’un aérodrome...)

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     

    Les escadrons ont été réorganisés : Michel ABALAN est passé au 1er escadron avec Blaise Alexandre tandis que son ami Louis Tritschler reste au 2ème. Il note :

    « Jeudi 30 août : « l’escadron est maintenant commandé par le Lt Troquereau ».

    [1]  Jacques Demarle, mort pour la France dans les Vosges en 1944.

    [2]   Fernand Galin

     

    En Egypte et en Cyrénaïque avec le R.M.S.M. (1942-1943)

     

    Par décision du général Catroux en date du 24 septembre 1942, le 1er Régiment de marche de spahis marocains (R.M.S.M.) succède officiellement au G.R.C.A. Devenu régiment de cavalerie mécanisée, il est placé sous les ordres de Jean REMY et constitué de quatre escadrons.

    Le R.M.S.M. va alors former deux groupes de reconnaissance sur le modèle des « colonnes volantes » britanniques (Flying Columns), sous les ordres des commandants Rémy et de Kersauzon.

    Renforcé par la 1ère compagnie de chars de la France Libre, le G.R.2 Kersauzon, équipé le premier d'automitrailleuses et de canons portés, rejoint dès fin août 1942 la 7e division blindée britannique (les "Rats du Désert") au sud du front de la VIIIe armée britannique et il effectue des raids en profondeur dans le désert de Libye.

    Le G.R. 2 est rattaché en septembre à la 1ère Brigade française Libre du général Koenig avec laquelle il va participer à la bataille d’El Alamein qui s’enclanche le 24 octobre 1942.

    Michel ABALAN et le G.R.1, ayant été de leur côté dirigés sur Fayoum, ne participeront pas directement à cette Bataille.

     

    Carnets - « Jeudi 5 novembre 1942 : départ vers Alexandrie. Lundi 9 novembre…  Retrouvé les camarades du G.R. 2... notre position doit être 40 km au Sud d’El Alamein…. Mercredi 11 novembre…. Messe des morts…. L’après-midi Hillion part avec sa Jeep, comme ils sont déjà 4 je ne vais pas avec eux. Le soir ils ne sont pas de retour... la jeep a sauté sur une mine... Cela s’est passé à l’Himeimat, piton à 15 km à l’Ouest du Camp… 3 décembre... départ à 8h 30, passage à El Alamein à 13 h 30, arrivée sur un point du rivage à 25 km d’Alexandrie à 17 h 30… »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    1942 - El Tahag

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    1942 - Les spahis  Fernand Galin et Mesgard 

     

    Ce sont ensuite les opérations en Cyrénaïque, de fin décembre 1942 au 1er mars 1943.

    Carnets - 13 décembre 1942 : « départ… passe d’Halfaya… canonnade au-dessus de Tobrouk…. 2 obus de DCA ont sifflé et sont tombés près de notre camp... le régiment a quitté El Adem II le 2 janvier 1943 pour arriver le 9 à Benghazi. La piste était très mauvaise, les embourbements innombrables. »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Michel Abalan et un groupe de spahis à Halfaya

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Epave de stuka en Libye  

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Messe à Bir Hakeim

     

    Le récit qui suit raconte les conditions dans lesquelles 2 janvier 1943, après avoir dépassé Bir-Hakeim, la Colonne volante oblique vers le Sud avec pour objectif l’azimut 194 qui doit la conduire à Bir Gania.

    Un calot rouge : « Au départ, le ciel, est bas et à partir de Bir-Hakeim, il commence à pleuvoir. Bientôt, le désert se transforme en un vaste bourbier parsemé de lacs et d'étangs entre lesquels les véhicules pataugent, s'embourbent, repartent, s'enlisent à nouveau. Aussi loin que l'œil peut porter, la plaine est jonchée de véhicules en difficulté, des équipages qui s'affairent pour tirer leurs camions ou leurs A.M. du marécage dans lequel ils s'enfoncent.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     Auto-mitrailleuse embourbée en Libye

     

    Naturellement Bir Gania n'est pas atteint et la colonne stationne pour la nuit dans la boue et sous la pluie. Le lendemain la marche est reprise vers le Sud dans les mêmes conditions atmosphériques et au soir le gros de la division arrive péniblement à franchir une trentaine de kilomètres. Il laisse derrière lui une traînée de véhicules en panne dont le nombre augmente au fur et à mesure de l'avance. La pluie ne cessant pas, le commandant de la division décide, devant l'épuisement de ses réserves d'essence, de rejoindre le terrain rocailleux de la région de M'Sous.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     Dépannage d'un camion embourbé

     

     

    Le 4 janvier, la 4e division indienne et la 50e division d'infanterie britannique, qui suit ses traces, obliquent vers le Nord-Ouest. Il faudra encore deux jours de lutte contre l'eau et la boue pour atteindre la terre ferme près de M'Sous. Dans le triangle délimité par M'Sous, Bir Gania et Bir-Hakeim, plus de 800 véhicules ont dû être abandonnés. Ceci représente 20 à 25 % des dotations de deux divisions. Le 1er C.A. n'est plus apte au combat et reçoit l'ordre de se regrouper près de Benghazi pour remettre son matériel en état. Le 30e C.A. continuera la poursuite de l'ennemi.

     La Colonne Volante a souffert comme les autres formations, ayant pris part à la marche « Azimut 194 ». Un peu moins cependant, car à l'arrivée à Benghazi, il ne lui manque que 15 véhicules, ce qui représente 12 % de son effectif. Encore quelques voitures rejoignent-elles dans les jours qui suivent. »  [1]

     

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    1943 -  Passage à Benghagzi 

     

    [1]   Récit anonyme, signé « un calot rouge ». Revue de la France Libre n° 57 - Avril 1957 

     

     

    La Tunisie (mars-juin 1943) : Michel Abalan à l’Oued Gragour

     

    Le 12 février 1943, la Colonne volante reçoit l’ordre de joindre Tripoli où elle se mettra à la disposition du 30e C.A. pour être engagée dans le Sud Tunisien. MICHEL ABALAN relève dans ses Carnets : « le 16 février à 14 h départ de Benghazi… ». 

    Par la Via Balbia, la Colonne traverse la plaine de Benghazi, et la Syrtique. L'étroite bande d'asphalte de la route se faufile entre les dunes et les marais salants. Tout le long de la route, des croix isolées et des pancartes « Keep out-Mines » témoignent du travail accompli par les sapeurs de Rommel. Toutes les maisons cantonnières, toutes celles de Syrte et de Bouerat sont farcies de pièges.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     

    Michel ABALAN note : « le régiment est arrivé à Tripoli le 22 février... le 25 passé la frontière ». En effet, le 26 février 1943, la Colonne franchit la frontière tunisienne et bivouaque quelques jours à Ben Gardane pour remettre son matériel en état avant d'être engagée dans le Sud tunisien : « …. Le 2 mars Ben Gardane-Tatahouine…. Le lendemain rejoins le régiment en ligne. »

    Début mars 1943, la Colonne volante se trouve donc entre Medenine et Foum Tataouine.

    Le dispositif allié est installé face à la ligne Mareth ; entre la gauche du dispositif allié et la position occupée par la Colonne volante existe un trou d’environ 10 km. Le général Montgomery qui attend une contre-offensive de Rommel, craint une tentative de débordement de sa position par le Sud et donne au commandant de la Colonne volante l’ordre d’arrêter à tout prix toute progression ennemie, soit en la maintenant de face, soit en la contre-attaquant dans le flanc.

    Le 3 mars, les spahis reçoivent pour mission de relever un escadron du King Dragoon Guard stationné dans la vallée de l’Oued Gragour et de patrouiller vers l’ouest dans les vallées pénétrantes du Matmata. Michel ABALAN ne sait pas encore qu’il ne va pas tarder à s'illustrer lors des combats qui s’engagent face aux hauteurs de Matmata près de Médenine…

    Carnets :  « …. Le 5 mars au matin le Régiment se rapproche de la route …. à l’aube le 5ème peloton se laisse surprendre par une offensive d’une division blindée allemande …. Les Allemands essaient de couper la retraite au régiment et bombardent d’une très bonne position… ».

    Le 6 mars à 6h30, les deux pelotons d’Automitrailleuses qui verrouillent les débouchés Est des oueds Temzaiet et El Kheil signalent des bruits de chars vers le fond des vallées. A 7h30, le premier contact est pris avec de fortes colonnes blindées ennemies. Les deux pelotons d’AM mènent le combat retardateur pendant que le gros de la Colonne volante alertée se porte aux emplacements de combat.

    Au moment où le gros des forces ennemies débouche dans la plaine, 3 pelotons d’auto-canons sont en position sur un front de trois kilomètres, entre la sortie de l’Oued Gragour dans la plaine et la route de Medenine à Foum Tataouine. Ils prennent sous leurs feux les véhicules ennemis, en détruisent plusieurs et mettent le désordre dans les colonnes. La Compagnie de Chars est prête à contre-attaquer et la progression ennemie est ralentie et arrêtée à hauteur de la route de Medenine.

     

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    6 Mars 1943 : Groupe  de spahis  - Michel Abalan est le 3e de gauche à droite

     

    Michel ABALAN reçoit sa première citation à l'Ordre de la Division. Il est nommé Maréchal des Logis le 25 juin 1943.

     

    Ordre général n° 46 du 15 mai 1943 du Général de Larminat :

    « Jeune gradé radio courageux et calme au feu, le 6 mars 1943 au combat de l’Oued Gragour, a fait preuve du plus grand sang-froid, n’abandonnant sa voiture touchée par un coup direct qu’après avoir rendu compte de l’accident, emportant les armes et tous les papiers importants contenus dans la voiture, malgré l’acharnement de l’ennemi sur le véhicule immobilisé ».

     

    Un de ses enfants : « Mon père, dont l’automitrailleuse avait été mise à la disposition du S/Lt Moore, m'avait raconté cette anecdote : lors du combat de l'Oued Gragour le 6 mars, son automitrailleuse a été percutée par un obus au niveau de la partie postérieure du réservoir d’essence de gauche. Le S/Lt Moore a été éjecté. Mon père, radio de l'automitrailleuse, s'est vu demander par radio : "Où est votre autorité ? " Il a répondu : "Mon autorité a disparu ! " Le S/Lt (devenu plus tard Colonel) Moore s'en souvenait aussi… »

     

    Cette opération a coûté au 1er R.M.S.M. 4 auto-canons et 6 AM et 4 chars à la Cie de Chars. Mais elle a permis d’infliger à l’ennemi des pertes sévères : 22 véhicules, dont la moitié blindés.

     

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     1943. Groupe autour d'une A .M . à Tamezred . Michel Abalan à droite

    Le 12 mars 1943, le 1er R.M.S.M. reçoit l'ordre de rejoindre la force L, venue du Tchad et entrée en Tunisie sous les ordres du général Leclerc à Ksar Rhilane. Il participe dès lors à toutes les opérations de la Force L jusqu’à la fin de la campagne de Tunisie et, le 20 mai 1943, un détachement du 1er RMSM défilait dans Tunis libéré.

    Carnets : « Le 12 mars 1943 passé Tatahouine… le 16 mars rencontré des troupes de Leclerc pour la première fois... le 18 le régiment a pris une piste vers le Nord accompagné de troupes de chez Leclerc (Colonel Dio)… mines...tués….le 20 mars...passage à l’offensive, chars, A.M. artillerie, DCA, camions se suivent sur 10 pistes parallèles droit au Nord à partir de 8 h du matin…. le lendemain notre groupement (PHR, 1er Pel, 4ème Pel., Ballarin) est envoyé en flanc gauche des colonnes de ravitaillement… la première nuit un avion bombarde et nous rate de 100 m…. le 27 notre groupement rejoint le régiment….. Gabès... Kairouan... El Adem …. dans la journée du 14 avril l’ennemi a tiré au 88… fin avril activité de patrouille…. Le 20 mai défilé à Tunis devant Giraud, Eisenhower et autres comme chef d’une Humber. Foule énorme criant « Vive de Gaulle ».

     

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    Tunis, la Victoire... Tous droits réservés

     

    Jusqu'à la fin du mois d'août 1943, les spahis et la 2e DFL rejoignent la 1re DFL en Tripolitaine au camp de Sabratha (Libye) où les deux divisions ont été envoyées "en pénitence" sur ordre du général Giraud, commandant civil et militaire à Alger, en attendant la conclusion des accords de Gaulle-Giraud.

     

     

    Aspirant, enfin ! Vers la 2e DB (1943-1944)

     

    Certains Français Libres, à l’instar du Maréchal des Logis Michel ABALAN, qui n’avaient pu terminer leur formation d’aspirant à Brazzaville, vont être admis à suivre les cours d'élève aspirant à Sabratha, dirigé par les lieutenants Oddo et Kochanowski.

     

    Il en sort promu au grade d'aspirant -  à compter du 26 juin 1943 [1], par ordre n° 19 du général Koenig.  Les épreuves eurent lieu à Temara (Maroc), la dernière le 6 octobre 1943.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Au Maroc au Printemps 1944 

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     

    Carnets : « 10 juin : Sabratha, reprise du cours d’Élève Aspirant… 31 août Medenine…. Gafsa… le 8 septembre train pour Rabat…. Mardi 14 septembre réveil en gare de Rabat... vers 12 h des camions nous amènent jusqu’à notre emplacement dans la forêt de Temara... Mercredi 6 octobre, dernière épreuve… marche de 6 km en 31 mn ». Lundi 7 octobre le soir à l’hôtel Balima, M.M. Oddo et Kochanowski, nos lieutenants instructeurs, nous offrent un dîner…. permission …. Alger... 31 octobre dernier jour à Alger. »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Octobre 1943 - Les  élèves aspirants à Tamara. (Michel Abalan à l'extrême gauche)

     

    Le 14 juillet 1943, Michel ABALAN reçoit la Croix de Guerre des mains du Général Leclerc : « 14 juillet. Remise Croix de Guerre par Leclerc, au P.C. du Colonel. J’ai touché de nouveau un insigne « France Libre », insigne des forces terrestres, celui que j’avais touché en Angleterre ayant été perdu à bord du « Chantilly. » 

     

    Au mois d’octobre, le 1er RMSM, toujours sous les ordres du lieutenant-colonel Rémy, devient officiellement le régiment de reconnaissance de la 2e Division blindée du général Leclerc, réorganisé et rééquipé en matériel américain. Il est alors composé d'un escadron de chars légers à trois pelotons de cinq chars et de quatre escadrons d'automitrailleuses à trois pelotons de cinq automitrailleuses et il comprend plus de 1100 hommes.

     

    [1]  Louis Tritschler : « Nos nominations comptent du 25 juin 1943, pour tous, car nous sommes aspirants au titre de la France Libre, dont l'existence se termine à cette date. »

     

     

    Libérer la France (1944-1945)             

     

    Au Printemps 1944, Michel ABALAN, son unité et l’ensemble de la 2e DB, embarquent pour l’Angleterre où ils parviennent après 10 jours de mer.

    La 2e DB poursuit alors son entraînement à Hull avant de débarquer en Normandie le 1er août 1944, à Grand Camp (Utah Beach) près de Sainte-Mère l’Église. Michel ABALAN embarque à Southampton le 31 juillet 1944 à 22H sur un Liberty Ship.

    Le 1er RMSM va dès lors combattre en France, subissant de lourdes pertes en tête des différents groupements. Ses escadrons, toujours à l'avant-garde, sont répartis dans les différents Groupements tactiques (GTL, GTV, GTD et GTR) de la 2e DB.  L’unité va d’abord se distinguer dans les opérations de Normandie, au Mans, à Écouché et à Argentan.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Entrée à Alençon le 12 août 1944

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    A Sées, le 12 août 1944

     

    Michel ABALAN se distingue le samedi 19 août 1944 devant Argentan, à la tête d'éléments portés d'un peloton de reconnaissance. Il est blessé à la tête.

    Carnets - « Vers 11 h la patrouille Blednicki passe sur la grand-route tandis que je protège sa gauche. Le Tigre rate Gilbert à 200 m (traces sur l’A.M.) repli derrière les fumigènes de Garellei. Vers 12 h 30, avec mon A.M. seule, après un simulacre d’attaque par des tirs d’infanterie, j’arrive à 200 m d’un char camouflé, mitraille les hommes à terre et tire 12 obus de 37 puis me replie derrière des grenades fumigènes et la poussière. Le char tire sans m’atteindre. A 13 h, étant de retour, mais encore en tête, tandis que les mitrailleuses ennemies tirent sur nous, ayant la tête sortant légèrement de la tourelle, une balle me frappe à l’oreille gauche, une autre troue mon casque, une troisième ricoche sur la tourelle et me blesse au dos. Sigillo me conduit en jeep au Bataillon Médical où l’on me recoud l’oreille puis je rejoins l’échelon. »

     

    En dépit de sa blessure récente, Michel ABALAN participe à la Libération de Paris qui survient quelques jours plus tard, le 25 août. Tous les escadrons prennent part au "nettoyage" de la capitale. 

    Carnets : « Mercredi 23 août. Réveil 4 heures…. Ecouché, Alençon… à 13 h 40 avant Chartres, le Général de Gaulle nous dépasse. Nuit près de Villejust où quelques résistances (groupes de 50 à 100 Allemands avec 1 ou 2 armes ATC) … jeudi 24 août… à Longjumeau ... blessés par tirs artillerie ennemie…. à Massy ... tué par 88 dans tourelle…. progression arrêtée par résistance ennemie au Petit Massy, quelques blessés… obus de mortier, une douzaine de blessés... 25 août… Antony….Panthéon, quais,... Notre Dame, stationnement Place Saint Michel et Bd St Michel pendant que l’on réduit les résistances du Luxembourg. Vers 15 h Bonnin est blessé mortellement d’une balle dans la tête en fouillant une maison près du Luxembourg … Jeudi 31 août enterrement de Bonnin et de plusieurs membres de la Division, dont le Capitaine Dupont … au cimetière parisien du Pantin. »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Libération de Paris - Août 1944

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     

    Michel ABALAN commande ensuite le 2ème peloton du 6ème escadron (Capitaine Kochanowski), de sa formation le 1 septembre 1944 sur l’Hippodrome de Longchamp, jusqu’à ce qu’il soit blessé en novembre en Lorraine : « Vendredi 1 septembre affecté à l’escadron porté où je prends le commandement du 2ème peloton (Willing 1er, Guellec 3ème) … travail d’organisation de cet escadron…  Mercredi 19 septembre passage de la Moselle sur un pont de bateaux…. 15 octobre la division est immobilisée, il y a eu des pertes (400 tués depuis le débarquement) et il faut instruire les remplaçants… »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Source Forum 2e DB 

    Carnets : « Vendredi 17 novembre. Le matin patrouille Devançay au bois Haie du Luth, Brigadier Hadj et Abdallah blessés, un prisonnier polonais tué par un blessé, récupéré les 2 blessés sous la protection des chars de Le Goasguen. L‘après-midi nettoyage du bois du Fays, tué 2 boches, capturé 3. Population sympathique de Montreux. Beau temps. »

    Le lendemain 18 novembre, à la tête d’un peloton du 6e Escadron Porté, à Parux (Meurthe-et-Moselle), il est de nouveau blessé par éclats d’obus alors qu’il remplit sa mission avec un plein succès, et refoule devant lui l'infanterie ennemie en lui infligeant des pertes sévères : « Samedi 18 Novembre à 14h Conus [2] tué, moi blessé... Dimanche 19 novembre opéré à 19h…. Lundi 27 novembre endormi pour fermeture plaie hanche et pansement. »

    Il est cité pour la seconde fois, et est bientôt promu au grade de sous-lieutenant.

    Le Général de Gaulle signera la citation suivante à l’Ordre de l’armée le 8 février 1945 : 

    « Jeune Aspirant animé d’un haut sentiment du devoir, remarquable par sa bravoure calme et froide. S’est dépensé sans compter aux cours des opérations des 16, 17, 18 novembre devant NONHIGNY, MONTREUX, PARUX. En particulier, a procédé avec plein succès, le 17, au nettoyage des bois de BREMENIL, prenant à partie avec un peloton une compagnie allemande de 140 hommes qui attaquait à bout portant, par bazookas, une colonne blindée du Sous-Groupement engagé sous bois, lui tuant du monde, faisant de nombreux prisonniers et mettant le reste en fuite. Le 18, engagé sous bois à l’attaque de Parux, en flanc-garde des chars, a rempli sa mission avec plein succès, refoulant devant lui l’infanterie allemande et lui infligeant des pertes sévères. A lui-même été blessé en parvenant aux approches du village. » Journal Officiel de la République Française du 04 03 1945, décision N°363

     

    En janvier 1945, Michel ABALAN rejoint son unité et est réaffecté au 5e escadron (Capitaine Troquereau) comme chef des pelotons d’échelon, P.H.R., 1er peloton, de l’Alsace à l’Allemagne [2].

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Michel Abalan en Alsace, février 1945

    Il participe en mars 1945 aux opérations du front de La Rochelle où le régiment est rassemblé en réserve : « Janvier 45, je suis réaffecté au 5ème escadron, celui où j’étais au désert, où les « anciens » sont devenus rares...   Mars 45 Saint-Jean d’Angely, Tonnay-Charente... 3 avril, reconnaissance des lignes avec Moore au N.E. de Rochefort…. Argenton sur Creuse…. Lorraine… »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Poste de guet à Fouras le 17 avril 1945

     

    Puis survient enfin pour le 1er RMSM, la traversée du Rhin et la marche victorieuse en Allemagne : « Lundi 30 avril entré en Allemagne…. Mardi 8 mai Berchtesgaden… samedi 19 mai grande prise d’armes de toute la division sur un terrain d’aviation au Sud d’Augsbourg…. Arrivée du Général de Gaulle… défilé… dimanche 20 mai avec Aymès [3] et Moore à Dachau où nous n’avons pas pu entrer... »

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Défilé à Lechfeld le 19 mai 1945

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

    Camp en Allemagne fin mai 1945

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN  

    Obusiers et chars sur wagons fin mai 1945

     

    [1]  Yves Conus.

    [2]  Note de Michel Abalan en tête de son carnet de juillet 44 au 20 septembre 45. 

    [3] Plus probablement : Bernard Aynes.

     

    La guerre étant terminée, au retour d‘Allemagne, Michel ABALAN relève dans ses carnets : « Samedi 26 mai, près de Nancy sur les lieux des combats de novembre et les tombes des camarades…. Paris…...Vendredi 22 juin à Fontainebleau le Général Leclerc nous a fait ses adieux… a remis le Commandement de la 2ème D.B. au colonel Dio… 18 septembre j’ai décidé de me faire démobiliser sans délai, d’autant que j’avais appris que j’étais nommé administrateur adjoint des colonies…. Le 20 septembre démobilisé. »

    Suite à sa démobilisation en septembre 1945, MICHEL ABALAN est intégré dans le corps des administrateurs des services civils de l'Indochine, avec le grade d'attaché de liaison administrative.

     

    * Les Spahis de la France Libre - 4/4 : Le parcours 1940-1945 du Compagnon de la Libération Michel ABALAN

     Michel Abalan, Paul Willing et Louis Tritschler en septembre 1945

     

    Michel ABALAN est fait Compagnon de la Libération par décret du 17 novembre 1945.

    De février 1946 à mai 1949, il sert en Indochine et au Tonkin où il reçoit une citation à l'ordre de la Brigade pour avoir, entre mars et juin 1948, apporté une aide des plus efficaces aux opérations de pacification en pays Muong :

    « Conseiller Provincial pour Hoabinh depuis mars 1948 payant toujours de sa personne et apportant une aide très efficace aux opérations de pacification du pays Muong. S’est particulièrement distingué lors de l’embuscade du 14 juin 1948 au Pont de Lang Koc (Chau de Lacson province de Hoa-Binh) par son calme et son sang-froid » (Signé Le Général de Brigade KOCH, Commandant les Troupes Françaises d’Indochine du Nord, le 15 décembre 1948).

    A partir de 1950, administrateur adjoint puis administrateur des Colonies, il est affecté en AEF, à Brazzaville puis au Gabon, où il occupe, en 1959 et 1960 les postes de Préfet par intérim et d'adjoint au Préfet de l'Ogoué-Maritime à Port-Gentil.

    De 1961 à 1976, il est agent contractuel à l’Éducation Nationale.

    Michel Abalan est décédé le 16 février 2000 à Saint-Renan dans le Finistère et a été inhumé à Porspoder (29), village qui jouxte celui d'Argenton, d'où il était parti il y a 60 ans, le 19 juin 1940, pour l'Angleterre.


    • Commandeur de la Légion d'Honneur - décret du 13 mai 1996
    • Compagnon de la Libération - décret du 17 novembre 1945
    • Croix de Guerre 1939-45 (2 citations)
    • Croix de Guerre des TOE 
    • Médaille des Évadés
    • Croix du Combattant 39/45 
    • Croix du Combattant Volontaire 39/45 
    • Croix du Combattant Volontaire de la Résistance
    • Médaille des Blessés
    • Médaille Coloniale avec agrafes "Libye", "Tunisie", "Extrême-Orient".
    • Médaille Commémorative de la France Libre
    • Officier de l’Étoile d'Anjouan

     

    Biographie sur le site de l'Ordre de la Libération  Lien

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    Mme Monique Sibon, son épouse, 

    Juliette, François, Jérôme, ses enfants, et leurs conjoints, ses petits-enfants, 

    ses frères et soeurs, ses neveux et nièces 

    ont la grande tristesse de vous faire part du décès du 

    docteur Charles SIBON Français libre, chevalier de la Légion d'honneur, médaille militaire, 

    survenu le 1 er mars 2018, dans sa 95 e année. 

    L'inhumation a eu lieu dans l'intimité familiale. 

    30 bis, rue Faidherbe, 78500 Sartrouville.

     

    La Fondation BM 24-Obenheim présente toutes ses condoléances à sa famille


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    * Un hommage à Arnaud BELTRAME

    Vox Societe | Le FIGARO -  Par François-Xavier Bellamy  le 25/03/2018 

    TRIBUNE - Arnaud Beltrame, ce soldat d'exception, nous lave de nos médiocrités et nous engage à nous ressaisir, explique  François-Xavier Bellamy, Ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de philosophie.

    " Les actions humaines ne sont pas des événements aléatoires. Un phénomène physique peut s'expliquer par ses circonstances immédiates ; mais pour comprendre le choix d'un homme, il faut le relier à une histoire, dont aucun geste n'est détachable. Ce n'est pas sur le champ de bataille, dit Aristote, que l'on devient courageux: nos actes sont toujours le résultat d'une disposition cultivée peu à peu. Dans la décision la plus spontanée, s'exprime en fait une intention - à travers elle un projet, une certaine idée de la vie, et la conception du monde dans laquelle elle a pu mûrir ; et par là, toute une culture, au sein de laquelle s'est formée peu à peu la vie intérieure dont notre action n'est finalement que l'émanation visible.

    «Le don de soi ne s'improvise pas ; et c'est la somme de générosité cultivée dans les jours ordinaires qui s'est soudain condensée, face au danger, dans cette initiative inouïe.»

    Ce vendredi matin, le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame est parti prendre son poste, comme il le faisait chaque jour depuis sa première mission, vingt ans plus tôt. Il ne pouvait se douter qu'il partait pour la dernière fois. Mais le don de soi ne s'improvise pas ; et c'est la somme de générosité cultivée dans les jours ordinaires qui s'est soudain condensée, face au danger, dans cette initiative inouïe. Sans même connaître le détail des faits, il est certain que l'officier n'a pas dû réfléchir longtemps: un tel choix, dans le feu de l'action, ne peut être que simple, aussi simple qu'il semble humainement impossible ; comme le geste virtuose d'un grand sportif, d'un grand artiste, paraissent simples, parce qu'ils sont en fait l'expression d'une habitude longtemps travaillée. Arnaud Beltrame, lui, avait choisi pour métier de servir: il s'était formé, entraîné et exercé pour cela. Sans avoir eu la chance de le connaître, il suffit de lire les quelques lignes qui racontent son geste pour comprendre que cet homme, en dépassant son devoir d'officier, a simplement été au bout de ce choix qu'il avait fait - et qui l'avait fait. Un tel acte ne naît pas par hasard, il ne s'invente pas sur le coup. Et il ne serait jamais arrivé, s'il n'avait pas été préparé par l'effort de toute une vie ; par l'esprit de tout un corps, celui de la Gendarmerie nationale, de la communauté militaire ; et finalement, par l'âme de tout un peuple.

    «Pour l'éthique utilitariste qui prévaut si souvent aujourd'hui, son geste n'a servi à rien.»

    C'est sans doute pour cette raison qu'instinctivement, toute la France se sent touchée à travers lui. Un esprit froid pourrait trouver cela étrange. Il y a eu d'autres victimes, à Carcassonne et à Trèbes, qui ne méritent pas moins notre deuil. Et puis, pour un siècle marqué par l'impératif de la rentabilité et par l'obsession numérique, l'acte de cet officier n'enlève rien à la défaite, puisque le terroriste a tué: Arnaud Beltrame a donné sa vie pour une autre. C'est une vie pour une vie. À la fin, le compte est le même: en termes de big data, l'événement est invisible. Pour l'éthique utilitariste qui prévaut si souvent aujourd'hui, son geste n'a servi à rien ; et j'ai même pu lire que certains finissaient par le critiquer: après tout, il y aura d'autres terroristes demain, et un gendarme bien formé serait plus utile vivant.

    Mais voilà, nous avons le sentiment inexprimable que cet homme nous a sauvés. Tous. Pas seulement cette femme innocente arrachée à la violence, mais nous tous, à travers elle. Et je crois qu'en effet malgré les apparences, Arnaud Beltrame a, par le don de sa vie, remporté une victoire absolue contre la haine islamiste - et contre ce qui, dans nos affaissements intérieurs, avait permis à cette haine de se tracer un passage.

    «Victoire contre le terroriste : son but était d'arracher des vies pour créer la peur, et la soumission qu'elle prépare. Mais on ne prend rien à celui qui donne tout…»

    Victoire contre le terroriste: son but était d'arracher des vies pour créer la peur, et la soumission qu'elle prépare. Mais on ne prend rien à celui qui donne tout… Collectivement, à travers cet officier, notre peuple tout entier n'est plus une victime passive ; il nous rend l'initiative. Mourir n'est pas subir, dès lors qu'on sait pour quoi on meurt. Après tout, les djihadistes n'admirent rien tant que les martyrs.

    Mais nos martyrs, eux, servent la vie. Et en nous le rappelant, Arnaud Beltrame, comme ses frères d'armes qui se sont risqués avec lui, nous sauve aussi de nous-mêmes, et de nos propres oublis… Nous avions fini par construire un monde où ce don était impensable: une société atomisée, faite de particules élémentaires entrant en contact ou en concurrence au gré de leurs calculs ; une société de consommateurs préoccupés de leur seul bien-être, composée de castes et de communautés d'intérêts plus que de citoyens conscients du commun essentiel qui les lie ; une société où la politique même pouvait se dissoudre dans le projet terminal de «l'émancipation de l'individu».

    Mais dans cette société obsédée par la revendication des droits, le sacrifice d'Arnaud Beltrame deviendrait bientôt impossible ; car pour qu'un tel abandon advienne, il nous faut d'abord savoir que le sens de la vie humaine se trouve dans le don que chacun fait de lui-même. Non dans le contrat et l'échange bien calculés, qui enferment chaque homme dans sa solitude, mais dans ce que nous apportons à des œuvres qui nous dépassent. Non dans l'émancipation de tout lien, mais dans la force des engagements qui nous relient, et qui entraînent tout de nos vies.

    «Pour faire un Arnaud Beltrame, il a fallu des siècles de civilité, de littérature, de philosophie, de science et de foi…»

    La maison est plus que les matériaux qui la composent, écrit Saint-Exupéry dans laLettre au général X. Un peuple est plus qu'une juxtaposition d'individus qui «vivent ensemble». Cela, nous l'avons appris, comme d'autres, par ce que notre civilisation a cultivé de singulier ; pour faire un Arnaud Beltrame, il a fallu des siècles de civilité, de littérature, de philosophie, de science et de foi… En désertant cet héritage, nous traversons ensemble, au beau milieu de notre prospérité matérielle, un véritable «désert de l'homme». Et la soif qu'il a fait naître, notamment chez les plus jeunes auxquels nous n'avons pas su transmettre, laisse proliférer la source empoisonnée de l'islamisme - ce succédané morbide de transcendance, dont le délire va jusqu'à faire d'un meurtrier un martyr. Face à son bourreau, un gendarme désarmé nous sauve tous, en nous rappelant qui nous sommes: de ceux qui sont prêts à mourir, non pour tuer, mais pour sauver.

    Bien sûr, il nous reste encore beaucoup de chemin à faire avant que soient vaincus tous les avatars de cette haine qui veut nous détruire. Beaucoup, même, avant que nous soyons enfin tous capables de dénoncer notre adversaire, l'islamisme, dans sa violence terroriste comme dans ses tentatives politiques. Il nous faudra bien plus d'exigence, de vigilance, de lucidité, que la somme des lâchetés publiques qui ont permis ces méfaits. Mais, mon Colonel, avec ceux qui vous épaulaient et qui prennent votre relève, vous nous avez déjà montré comment atteindre la victoire que nous vous devons maintenant, parce qu'à travers votre engagement, nous reconnaissons simplement ce qu'il nous faut redevenir ; et de cela, simplement, nous vous serons, pour toujours, infiniment reconnaissants".

     


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    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    La Campagne de Tunisie

    Le 26 février 1943, la Colonne volante franchit la frontière tunisienne et va bivouaquer pendant quelques jours à BEN GARDANE pour remettre son matériel en état avant d'être engagée. Pour la plupart des spahis c'est le premier contact avec une terre française depuis près de trois ans mais ce contact est un peu décevant.

    Un calot rouge : « La population indigène nous regarde avec indifférence. La seule chose qui semble l'intéresser c'est la quantité de thé qu'il est possible d'obtenir de nous en échange de quelques œufs ou d'un poulet rachitique. La guerre n'intéresse les Tunisiens qu'autant qu'elle constitue une source de profits. Grâce aux échanges ou à la rapine ou à d'autres actions plus dangereuses mais aussi plus lucratives : on trouve sur les pistes des tellermines ou des mines de bois posées de nuit par des mains inhabiles mais intéressées.

    À BEN GARDANE, il n'y a pratiquement pas de Français. Seuls deux officiers des affaires indigènes viennent nous voir, plutôt en curieux qu'en camarades, heureux de trouver des compagnons qui ont eu la chance de combattre. Ils sont affublés de casquettes et pattes d'épaules brodées d'or qui leur donnent un vague air d'officiers italiens endimanchés".

     

    Les spahis vont alors s'illustrer lors des combats face aux hauteurs de MATMATA près de MEDENINE. L'arrivée de la Force L du général Leclerc en provenance du Tchad fait que, rapidement, le 12 Mars, la Colonne volante y est incorporée, et va effectuer avec elle la campagne de Tunisie.

    Début mars 1943, la Colonne volante comprenant toujours le 1er RMSM et la 1ère Cie de chars français Libres se trouve dans le sud tunisien entre MEDENINE et FOUM TATAOUINE.

    Le dispositif allié installé face à la ligne MARETH décrit un arc de cercle de la mer au kilomètre g de la route Medenine-Foum Tataouine ; entre la gauche du dispositif allié et la position occupée par la Colonne volante il existe un trou d’environ 10 km.

    Le général MONTGOMERY attend une contre-offensive de ROMMEL et craint une tentative ennemie de débordement de sa position par le Sud.

    Il donne en conséquence au commandant de la Colonne volante l’ordre d’arrêter à tout prix toute progression ennemie, soit en la maintenant de face, soit en la contre-attaquant dans le flanc. Il insiste particulièrement sur l’importance de cette mission.

     

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

    Général Montgomery

     

    Le 3 mars, la Colonne reçoit pour mission de relever un escadron du King Dragoon Guard stationné dans la vallée de l’OUED GRAGOUR et de patrouiller vers l’ouest dans les vallées pénétrantes du MATMATA.

     

    Résumé des opérations de MEDENINE du 6 Mars 1943

     

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    Le 6 mars à 6h30, les deux pelotons d’AM qui verrouillent les débouchés Est des oueds TEMZAIET et EL KHEIL signalent des bruits de chars vers le fond des vallées. A 7h30, le premier contact est pris avec de fortes colonnes blindées ennemies. Les deux pelotons d’AM mènent le combat retardateur pendant que le gros de la Colonne volante alertée se porte aux emplacements de combat.

    Au moment où le gros des forces ennemies débouche dans la plaine, 3 pelotons d’auto-canons sont en position sur un front de trois kilomètres, entre la sortie de l’OUED GRAGOUR dans la plaine et la route de MEDENINE à FOUM TATAOUINE. Ils prennent sous leurs feux les véhicules ennemis, en détruisent plusieurs et mettent le désordre dans les colonnes. La Compagnie de Chars et prête à contre-attaquer.

    La progression ennemie est ralentie et arrêtée à hauteur de la route de Medenine. L’ennemi hésite à s’engager plus à fond en laissant derrière lui une force qu’il semble d’ailleurs surestimer. Ses tentatives de rejeter la colonne volante vers le Sud échouent. Il lance alors dans le flanc ouest de la Colonne volante une attaque d’un bataillon d’infanterie qui progresse par la montagne. Devant cette menace, la Colonne volante se regroupe à proximité immédiate de la route de MEDENINE qu’elle continuera à interdire à l’ennemi jusqu’au soir.

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

    Cette opération a coûté au 1er RMSM 4 auto-canons et 6 AM et 4 chats à la Cie de Chars. Elle a permis d’infliger à l’ennemi des pertes sévères : 22 véhicules dont la moitié blindés.

    Le commandement britannique a manifesté sa reconnaissance en attribuant la Distinguished Services Order au commandant du RMSM, la Military Cross au commandant de l’escadron d’autos-canons.

     

    Un calot rouge : « Le lendemain, 7 mars, nous apprenons que l'attaque de ROMMEL a été repoussée partout. Les pertes allemandes ont été particulièrement élevées devant le secteur de la 201e brigade de la garde, où les Panzer Division en perdirent près de 50 chars.

    La Colonne Volante compte à son tableau de chasse 23 pièces dont deux automoteurs de 75 PAK et trois A.M. Elle-même perdit dans le combat quatre A.M., deux A.C. et quatre chars dont deux par accident mécanique. Les pertes en hommes sont de quatre tués, six blessés et 14 disparus. Parmi ces derniers, 12 appartenaient au peloton de l'aspirant C... qui, dès le début de l'action, isolé dans une vallée, fut coupé du reste de la colonne. Deux jours plus tard, l'aspirant C... nous rejoint ramenant avec lui trois de ses hommes, dont un blessé. Nous apprendrons ainsi que le groupement qui nous était opposé était le groupe de reconnaissance Kiel, notre vieille connaissance d'EL HIMEIMAT.

    Vers midi, la liaison est prise avec le groupe de reconnaissance de la 2e division néo-zélandaise à BiIR AHMAR. L'ennemi s'est replié, mais avant de se retirer il a eu le temps de semer des mines un peu partout. Nous perdons encore un auto-canon et deux hommes blessés, dont le maréchal des logis V..., qui la veille détruisit une A.M. allemande en tirant sur elle à 100 mètres, le dernier obus de son coffre". (1)

     

     

     

    Fusion de la Colonne volante avec la Force L

    Le 12 mars 1943 la Colonne Volante reçoit l'ordre de rejoindre la force L...,  venue du Tchad sous les ordres du général Leclerc  à KSAR KHILANE.

    Elle participe dès lors avec la Force L à toutes les opérations que cette formation effectue pendant la campagne de Tunisie, et prend une part particulièrement importante à l’occupation d’EL ORTID le 18 mars 1943 ; l’enlèvement du col du Borg FEDJEID le 7 avril, l’occupation de MEZZOUNA le 9 avril et les opérations autour du djebel FADDALOUN du 12 au 16 avril 1943.

    L’ensemble de ces faits d’armes figurent sur l’emblème du RMSM sous le nom de « Tunisie 1943 ».

    Avec la Force L

    « Le 15 mars, la Colonne Volante rejoint KSAR RHILANE. En cours de route le général de LARMINAT vient nous voir et s'entretient avec nous du passé et de l'avenir. Il nous parle de l'état des esprits en A.F.N. et des difficultés qu'il prévoit avant la réalisation de la fusion de toutes les forces françaises ayant repris les armes contre l'ennemi.

     

    Cependant le général Montgomery prépare un nouveau « left hook » (crochet du gauche). La 2e division néo-zélandaise et la 8e brigade blindée se massent entre le Grand Erg oriental et les contreforts du djebel MATMATA, un peu au sud de KSAR RHILANE. La force L... doit préparer le débouché des Néo-Zélandais en s'emparant de la colline d'EL OUTID qui domine un oued particulièrement difficile à franchir. Il faut aménager des passages pour permettre la circulation de quelque 5.000 véhicules qui vont être engagés.

     

    Toute la Colonne Volante participe à cette opération. Elle est appuyée par des éléments de la force L... ;  les unités franchissent le ravin dans la nuit, après que les sapeurs eurent déminé le lit de l'oued. La colline est largement débordée par l'Est et par l'Ouest. Un léger accrochage se produit vers 6 heures du matin avec un élément blindé ennemi venant de la direction de BIR SOLTAN. À 7 heures EL OUTID est occupé par les chars de la compagnie Divry ;  ceux-ci sont bientôt relevés par l'infanterie de la force L...

     

    Les seules pertes que nous avons à déplorer sont celles du lieutenant C... et de trois spahis de l'atelier du 1er R.M.S.M. Une A.M. s'étant trompée d'itinéraire dans l'obscurité a sauté sur une mine. Le lieutenant C... chef du service auto du régiment, voulant remettre le plus rapidement possible le véhicule en état, partit dans la nuit pour le reconnaître. Une mine « S » explosa, le tuant net ainsi que les trois spahis qui l'accompagnaient.

    Le surlendemain, 20 mars, le 1er R.M.S.M. les enterre au pied d'EI Outid. Une messe est dite par le Révérend Père FINET, aumônier de la Colonne Volante. Tous les spahis sont présents et très nombreux communient en cette veille de nouveaux combats.

    En effet, c'est ce jour même que le général Freyberg, commandant le corps d'armée néo-zélandais, lance son attaque en vue de déborder par l'Ouest la position de MARETH. Quelques minutes à peine après la fin de la cérémonie, les premiers chars néo-zélandais passent près de nous. Le général Freyberg est assis sur l'avant du char de tête. En passant il nous adresse des gestes amicaux.

    La force L a pour mission initiale de couvrir le flanc Est du corps d'armée néo-zélandais barrant les pistes du massif des MATMATAT qui descendent vers l'Ouest. La Colonne Volante est chargée de celle qui relie BENI-KREDACHE  à BIR SOLTAN.

     

    L'attaque menée par le 30e corps d'armée, le long du littoral échoue. Partout ailleurs la VIIIe armée marque des points. La 4e division indienne pénètre dans les massif des Matmatas et le commandant d'un bataillon Gourkhas envoie ce compte rendu resté célèbre dans la VIIIe armée : « Objectif atteint -stop - Pertes ennemies : 30 tués, 50 prisonniers - stop -nos pertes : néant - stop - munitions dépensées : néant - Fin ». L'attaque a été faite au couteau...

    La menace qui aurait pu s'exercer sur le flanc droit du corps néo-zélandais disparaît. Tout le dispositif se reporte vers le Nord, mais sa tête est arrêtée par le large fossé antichars qui barre la plaine entre le djebel TEBACA au Nord et le djebel MELAB au Sud et interdit toute progression blindée vers El HAMMA et GABES. Le général LECLERC s'empare, avec l'infanterie de la force L..., de la position du djebel MELAB et permet ainsi de déborder l'obstacle qui s'oppose à la progression.

     

    Le général MONTGOMERY renforce le corps néo-zélandais en lui envoyant les lère et 7e divisions blindées et une bataille confuse de chars s'engage entre ces deux divisions et les 15e et 21e Panzer.

    Pour la première fois dans l'histoire des opérations au désert, la R.A.F. participe directement au combat en attaquant les chars allemands sur le champ de bataille même. La Colonne Volante assiste de loin à ces engagements car elle a toujours pour mission de couvrir le flanc Est des Alliés.

     

    Quelques mouvements suspects de camions sont observés sur notre droite et un Conus Gun ouvre le tir en mettant en feu un des camions néo-zélandais et -comble de malheur, c'est le camion popote d'une des brigades qui a été touché. Des Néo-Zélandais viennent examiner de près l'engin qui a causé cette perte et admirer la précision du tir exécuté à plus de 800 mètres. Faisant preuve d'esprit sportif bien britannique, ils reconnaissent que l'incident est dû à une erreur d'itinéraire de leur part et sont tout prêts à arroser l'événement. Hélas, la réserve de whisky se trouvait précisément dans le camion qui flambe. On se quitte néanmoins bons amis.

     

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

    Conus gun

     

    Par les pistes défoncées, au milieu de carcasses de chars brûlés, la force L... et la Colonne Volante progressent vers l'Est. Elles bivouaquent dans la nuit du 28 au 29 mars près de QUATTANA et nous apprenons là, la prise de GABES où nous devons stationner pendant quelques jours en attendant le regroupement de la VIIIe armée, avant l'attaque de la position de l'oued AKKARIT. Le franchissement de l'étroit goulot qui s'étend entre la mer et le chott EL FEDIEDI  livrera à la VIIIe armée l'accès de la Tunisie centrale et nous permettra enfin de réaliser la jonction avec les forces franco-anglo-américaines qui viennent d'Algérie.

     

    Pendant le séjour près de la ville, nous entrons pour la première fois en contact avec la population française de Tunisie. L'accueil que celle-ci nous réserve est magnifique. Les spahis, les Marocains, les Chasseurs, les sous-officiers, les officiers connaissent la griserie de l'enthousiasme populaire.

    Pour ces enfants, que personne ne traite de prodigues, on tue le veau gras qui se réduit d'ailleurs à un poulet dont la coriacité témoigne de l'esprit de résistance. De derrière les fagots sortent les bouteilles échappées aux fouilles des Allemands et des Italiens. Le conseil municipal, ressuscité, reçoit le général LECLERC et les principaux officiers de la force L... et la Colonne Volante. Pour la première fois depuis bien longtemps nous voyons sur la table des bouteilles de Heidsieck extra-dry. Ce devait être un tour de force que de trouver ce Champagne après quatre ans de guerre et cinq mois d'occupation.

     

    À l'église de Gabès, une messe d'action de grâces est célébrée à l'occasion de la libération de la ville.

    Le général LECLERC assiste à cette messe entouré de ses officiers et des notabilités de la ville. Une foule énorme se presse dans la nef et déborde sur la place. L'aumônier du bataillon d'infanterie de marine et du Pacifique prononce un sermon dont le thème est ce cri du Christ :

    « Mon Père, faites que nous soyons Un. Oui, Mon Dieu, faites que nous soyons unis pour la même cause pour laquelle nous luttons chacun de notre côté, faites que cessent les jalousies mesquines, les soupesages sordides de grades et de mérites.»

    La sortie de l'église s'effectue aux cris de : « Vive de Gaulle ! » et « Vive Leclerc ! » et le général a quelque peine à fuir l'enthousiasme populaire.

     

    Les engagements sont de plus en plus nombreux et nous comblons rapidement les vides creusés par les derniers combats. Il était temps car à la Colonne Volante, le commandant a été obligé de refuser, faute d'équipage à y mettre, une partie du matériel que les Britanniques lui avaient offert pour remplacer celui détruit au combat.

    Un groupe de charmantes jeunes femmes, épouses des officiers de la garnison partis avec leurs troupes rejoindre les forces de l'A.F.N., s'attache à rendre notre séjour à Gabès le plus agréable possible.

    Chaque jour c'est un déjeuner, un thé, un bridge, tantôt dans l'une, tantôt dans l'autre, des maisons vite devenues amies. Nous nous rendons compte de ce que le moindre gâteau, la moindre tasse de thé représente d'ingéniosité de la part de la maîtresse de maison et aussi de privation pour les jours à venir. Le charme simple et plein de sensibilité de ces femmes nous a tous conquis et nous voudrions partager avec elles nos rations, mais elles les refusent avec gentillesse, mais aussi avec fierté. Avec l'intuition propre à leur sexe, elles ont compris que la raison est de notre côté et par leur attitude à notre égard elles semblent chercher à nous faire oublier toutes les injustices et calomnies dont nous avons été abreuvés.

    Tous ceux qui les ont connues garderont un souvenir fait de reconnaissance et d'émotion de ces réceptions qui ont permis aux sauvages du désert de goûter au charme de la vie civilisée et à la douceur de la présence féminine.

     

    Mais l'heure de nouveaux combats approche. Le 5, nous assistons nombreux à un thé bridge que nous savons devoir être le dernier. En les quittant nous disons un simple au revoir à nos charmantes amies, alors que nous savons très bien que notre séjour à GABES est terminé et que peut-être nous ne les reverrons jamais. Mais nous avons pris le pli de l'armée britannique « Don't Talk ». D'ailleurs à quoi bon parler du lendemain. Cette nuit à 3 heures, les tirs de préparation de l'artillerie de la VIIIe armée diront bien à toute la population de Gabès que les calots rouges, les bérets noirs et les calots bleu marine sont partis vers leur destinée.

     

    Le 6 avril, au lever du jour, la Colonne Volante reprend sa place habituelle à l'extrémité de l'aile gauche de la VIIIe armée. Des patrouilles sont envoyées vers le col du Bordj FEDJEDJ où elles accrochent une résistance ennemie. Le soir, le col est enlevé. Il était tenu par 117 Allemands dont deux feldwebel. Les officiers avaient reçu l'ordre de quitter la troupe et de se replier en auto vers le Nord. C'était tout ce qui restait du Kampfgrupp-Muller, arrivé en Libye du front oriental trois mois plus tôt à l'effectif de près de 800 hommes. Au cours d'un interrogatoire, l'un des feldwebel s'écrie :

    « Il n'y a plus d'armée allemande. Elle est morte en Russie ».

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    Avant de reprendre notre progression, il faut déminer un passage et combler le fossé antichars qui barre l'accès du col. Les prisonniers sont employés à ce travail. Ils l'exécutent avec une discipline et une aisance qui frappent nos hommes et les obligent à reconnaître que nos adversaires sont de splendides soldats.

     

    Le 7 avril, toute la force L... se porte vers le Nord, en direction de MEZZOUNA et de MAKNASSY, flanc gardant le gros de la VIIIe armée qui, par la route côtière, progresse vers SFAX.

    Le 8, Mezzouna est occupée après un court engagement livré par un des détachements de la Colonne Volante à l'arrière-garde ennemie. La progression continue et vers 10 heures nous recevons deux ou trois obus qui viennent de notre gauche.

    Sur les crêtes, dans la même direction, on aperçoit quelques silhouettes se profilant sur le ciel. Bien que ces hommes soient coiffés d'un casque rond, leur attitude n'est pas celle des Allemands. Ceux-ci en effet ne pitonnent pas et leur camouflage est toujours parfait. Une patrouille avance prudemment, sans tirer, pour prendre un contact plus étroit. Le mystère est rapidement éclairci. Ce sont des Américains du 3e corps d'armée U.S. qui viennent de GAFSA.

    Sans perdre notre temps à nous congratuler de la liaison enfin réalisée, nous poursuivons notre chemin. Vers 15 heures, nous nous heurtons à quelques chars Tigre qui livrent un combat retardateur, sans d'ailleurs nous causer aucune perte.

    Le lendemain, le mouvement est repris et nous franchissons la route SFAX-SBEITIA. Le 30e corps d'armée britannique entre le même jour à Sfax et tout le dispositif s'arrête quelques jours sur la ligne atteinte".

     

     

    De Kairouan au Dhebel Zaghouan

     

    Le 10 avril, une forte reconnaissance aux ordres du capitaine Morel-Deville est envoyée en direction de KAIROUAN. Elle pénètre dans cette ville dans l'après-midi, en même temps que les premiers éléments américains. L'accueil qui lui est fait par la population française est délirant.

     

    "Le lendemain, toute la force L... se porte sur KAIROUAN, dépasse cette ville et entame une manœuvre en vue de déborder SOUSSE par le Nord. La Colonne Volante constitue l'avant-garde de la force L.... A peine nous avons commencé à tourner la Sebkhia de SIDI EL HANI que nous recevons la nouvelle de la chute de SOUSSE et en même temps l'ordre de nous porter sur ENFIDAVILLE.

    Le mauvais terrain nous oblige à rebrousser chemin jusqu'à KAIROUAN pour prendre la route nationale qui mène à Enfidaville.

    Le temps est délicieux. Les récentes pluies d'hiver et la tiédeur du printemps ont transformé les terres incultes en prairies. Les jonquilles, les coquelicots et les asphodèles tissent sur le fond vert des arabesques de tapis d'Orient. Du haut de nos tourelles, nous contemplons ce spectacle qui ravit nos yeux habitués à la fauve aridité du désert. Nous comprenons l'émerveillement de Si Okba et de ses compagnons qui, 12 siècles avant nous, firent le même périple et qui mirent tant d'acharnement à conquérir cette terre qui a dû leur paraître un véritable paradis.

    Qu'il serait agréable de s'étendre au soleil sur le tapis moelleux des fleurs et herbes fraîches et odorantes et rêver tranquillement à la douceur de vivre. Mais nous ne sommes pas ici pour cela. Voici les briques rouges de murs de KAIROUAN, voici la route d'ENFIDAVILLE, bordée de marécages, faite en remblai, coupée d'oueds encaissés qu'elle franchit sur des ponts étroits. Tel le Juif Errant il nous est interdit de nous arrêter. En avant, toujours en avant...

     

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    Mais bientôt l'élan est brisé. À 12 kilomètres de Kairouan, un pont détruit nous arrête. Les reconnaissances effectuées à proximité montrent qu'il est impossible de franchir l'oued rempli encore d'eau bourbeuse sur un fond de vase. À gauche et à droite, sur plusieurs kilomètres s'étend un enchevêtrement d'oueds et de marais dans lesquels s'embourbent tous les véhicules qui essaient de trouver un chemin.

    L'étude de la carte n'offre qu'une solution : contourner les marais par l'Ouest et rattraper la route de DJEBEBINA  et se rabattre ensuite par le haut de terrain en direction d'ENFIDAVILLE.

    Se fiant à son flair d'ancien méhariste, le commandant de la Colonne prend la tête de sa troupe et réussit à atteindre la route de DjJEBEBINA. Il fait nuit lorsque nous commençons à monter sur cette route. Bientôt nous nous imbriquons dans les formations de la 6e division blindée britannique qui vient de livrer un combat à l'arrière-garde de l’Afrika-Korps. Ça et là, des chars amis ou ennemis flambent encore et les explosions des soutes à munitions éclairent le terrain d'une lueur intermittente.

    Voici enfin un carrefour. Il est repéré, grâce surtout à un scout-car éventré et à un char déchenillé par les mines. Un examen plus attentif permet de trouver quelques mines posées au bord de la route. Les sapeurs ont travaillé ici. Mais jusqu'où ? Les blindés s'engagent précautionneusement, précédés par les chefs de voiture, qui à pied tâtent le terrain. Nous trouvons une piste à droite qui doit mener à EL-ALEM. C'est bien la bonne. Le carrefour est dépassé largement et nous apercevons une masse d'ombre d'arbres et de constructions. C'est bien El-Alem, centre d'un domaine de quelque 20.000 hectares.

     

    Tout est silencieux dans la petite agglomération et lorsque nous commençons à frapper aux portes, les gens mal éveillés refusent de croire que nous sommes des Français et flairent quelque ruse des Allemands. Enfin nous arrivons à les convaincre. Les portes s'ouvrent et malgré l'heure tardive (il est près de 2 heures du matin) c'est l'accueil habituel : embrassades, verres de vin, repas préparés à la hâte, brocs et cuvettes mis à notre disposition pour un brin de toilette. Nous apprenons que les Allemands s'étaient retirés d'EL-ALEM après le coucher du soleil, donc quelques heures à peine avant notre arrivée.

    Le lendemain, le général LECLERCet le gros de la force L..., rejoignent EL-ALEM. Une fois de plus la mission est changée et c'est vers SAOUAR que la Colonne Volante agira dorénavant. La progression est reprise de part et d'autre du djebel FADDALOUN, malgré les réactions des détachements retardateurs de la 15e Panzer.

     

    La partie Sud du djebel est occupée par les deux pelotons portés de spahis. Malgré la motorisation, nos spahis marocains, algériens et tunisiens ont su garder leurs qualités de grimpeurs. La rapidité avec laquelle ils atteignent le sommet du djebel surprend la section chargée de la protection du poste d'observation d'artillerie qui règle les tirs sur nos blindés éparpilles dans la plaine. Les Allemands étaient en train de manger au moment où les spahis franchissant le dernier changement de pente ouvrent le feu sur eux à une centaine de mètres de distance. Une quinzaine de prisonniers sont capturés. Le reste s'enfuit, laissant sur place tout le matériel y compris les binoculaires et le poste radio qui servait au réglage des tirs. Les résultats se font sentir immédiatement car les pièces ennemies se taisent jusqu'au moment où les premiers blindés dépassent vers le Nord le djebel FADDALOUN.

    L'horizon est barré par la muraille du djebel ZAGHOUAN. Ses avancées, le djebel TAKROUNA et GARCI sont impropres à l'action des blindés. La Colonne Volante passe la main à l'infanterie de la force L... et se regroupe à l'arrière".

     

     

    La guerre du recrutement

     

    Le recrutement devient la préoccupation majeure. Il faut combler les vides creusés par les derniers combats. Il faut aussi penser à la création d’unités nouvelles car personne ne considère notre rôle comme terminé.

    Les engagés affluent en masse. A SFAX, à SOUSSE, à KAIROUAN, des jeunes gens n’ayant jamais servi, des démobilisés après l’armistice de Compiègne, des sous-officiers en congé d’armistice, se présentent à nos unités et signent des engagements « pour la durée de la guerre plus trois mois ».

    Malheureusement des difficultés s’élèvent bientôt à ce sujet avec les représentants des autorités d’ALGER. En effet, au fur et à mesure de l'avance de la VIIIe armée britannique, les commandements territoriaux sont mis en place par le 19e corps d'Alger.

    Les changements survenus dans la situation depuis le Débarquement américain en Afrique échappent encore à certains qui continuent à voir en nous les « dissidents ». Pour eux l'élan qui jette vers nous ces jeunes gens avides de reprendre les armes est un mouvement criminel. Aussi n'hésitent-ils pas à menacer ceux qui nous rejoignent des foudres de la justice militaire pour avoir « contracté un engagement dans une armée étrangère ».

    Une période pénible commence et nous constatons que la prière de Gabès : « Mon Dieu, faites que nous soyons un », est encore loin d'être exaucée...

     

    Fin de campagne

     

    Cependant le rythme des opérations s'accélère. La 1ère  et 7e divisions blindées britanniques et la 4e division indienne passent de la VIIIe armée à la 1ère armée britannique. La 1ère D.F.L. nous rejoint et lance son attaque sur TAKROUNA.

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

    Le piton de Takrouna

     

    Le 7 mai, nous apprenons que les patrouilles du 11e hussards pénètrent à TUNIS et, le 12, nous entendons par hasard au poste radio de la popote le message suivant : « Here is the eight British Army calling to the first Italian Army. The conditions of redition are... ».

     

    Le 13 mai, la campagne de Tunisie est terminée. La patrouille du lieutenant Conus reçoit la reddition d’un bataillon allemand et d’un bataillon italien. Une fois de plus nous sommes frappés par l’attitude des vaincus. Les compagnies allemandes parfaitement alignées. Les adjudants rendent au commandant du bataillon l’appel dans la forme règlementaire, le matériel qui doit être remis et déposé en tas réguliers, mais il a été rendu inutilisable

    Nous constatons que si ces hommes ont été battus, leur moral reste intact, ils gardent toujours confiance en l’avenir.  Leur commandant salue ces hommes dont il est séparé pour longtemps.

    Se tournant vers le lieutenant Conus, il lui dit ces mots, que nous devions garder longtemps dans nos mémoires « Oui, l'Allemagne a perdu la guerre et il ne reste parmi nous aucun homme intelligent pour en douter. Mais ce dont vous ne vous doutez pas c'est combien de temps cette guerre durera encore ». [1]

     

    La campagne d'Afrique est terminée. D'autres combats attendent les spahis et les chasseurs. Ils les mèneront deux ans plus tard au nid d'aigle de Berchtesgaden sur lequel les trois couleurs flotteront un jour de mai 1945 pour prouver que ceux qui luttent ont toujours raison d'espérer.

    Des rives du Nil au pied du ZAGHOUAN, dans les sables fauves des dunes, dans la grisaille pierreuse des hamadas, dans l'argile rouge des steppes tunisiennes, des hommes dorment leur dernier sommeil. Le khamsine ou le sirocco effacent petit à petit les traces du passage des bérets noirs et des calots rouges. Mais la nature est plus lente que l'oubli des hommes.

     

    Le 20 mai 1943, un détachement du 1er RMSM défilait dans TUNIS libéré.

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    A l'issue de la campagne de Tunisie et jusqu'à la fin du mois d'août 1943, les spahis et la 2e DFL rejoignent la 1ère DFL en Tripolitaine au camp de SABRATHA (Libye) où les deux divisions ont été envoyées "en pénitence", sur ordre du général Giraud, commandant civil et militaire à Alger, en attendant la conclusion des accords de Gaulle-Giraud.

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943) 

    Tunisie - Le général Brosset à gauche et le général Leclerc de dos

     

    Les chemins des spahis et ceux de la 1ère DFL au sein de laquelle ils firent leurs premiers combats dans la France Libre, vont bientôt se séparer.  Il se recroiseront bien plus tard, en 1944 à NOD-SUR-SEINE en Bourgogne, à la jonction de leurs trajectoires respectives à la poursuite des Allemands :  d'Ouest en Est pour la 2e DB, du Sud au Nord pour la 1ère DFL !

     

    Cest à SABRATHA, durant cette période de "pénitence" qu'un certain nombre de spahis entament leur formation d'élève aspirant. Ils la termineront au camp de TAMARA au Maroc où le 1er RMSM fait mouvement à la mi-septembre 1943 avec la 2e DFL (future 2e DB) . 

     

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     Futurs aspirants du cours de Temara. Michel ABALAN est à l'extrême gauche 

     

    En octobre 1943, toujours sous les ordres du lieutenant-colonel REMY, le 1er RMSM devient le régiment de reconnaissance de la 2e Division blindée du général LECLERC. C'est à ce moment que s'échève l'histoire des spahis dans la France Libre,  alors qu'ils se préparent à  leur nouvelle épopée dans la Libération de la France.

     

    A l'image de la Division, le 1er RMSM est réorganisé et rééquipé en matériel américain. Il est alors composé d'un escadron de chars légers à trois pelotons de cinq chars et de quatre escadrons d'automitrailleuses à trois pelotons de cinq automitrailleuses et il comprend plus de 1 100 hommes.

    Le jour de Pâques 1944, les spahis et la 2e DB embarquaient pour l’Angleterre où ils poursuivraient leur entraînement à Hull, avant de débarquer en Normandie le 1er août 1944, à Utah Beach près de Sainte-Mère l’Eglise...

     

    (1) Revue de la France Libre n° 57 – Avril 1953

     

    La semaine prochaine, notre 4e et dernier volet de l'Histoire des Spahis dans les FFL vous présentera le parcours de l'un d'entre eux, le Compagnon de la Libération Michel ABALAN, de son évasion le 19 Juin 1940 d'Argenton dans le Finistère, à son entrée dans  Berchstengaden en Allemagne, cinq années plus tard....

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

     

    * Histoire des SPAHIS de la France Libre - 3/4 : Le 1er RMSM de la campagne de Tunisie à la 2e DB (Mars-Octobre 1943)

     

    Nod sur Seine 1944 : retrouvailles entre spahis (2e DB)

    et fusiliers marins (1ère dfl)  !

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     Journal de Marche  (1944-1945) de René MARTEL

    CA du BM 21  (enregistrements audio)

    Journal de Marche de René MARTEL (CA du BM 21) - enregistrements audio

     

    Mon père, René MARTEL est né à Asfeld le 27 octobre 1923.

    Après avoir fait partie de la résistance dans l’Aisne et les Ardennes, il s’est engagé à la D.F.L. le 16 octobre 1944 alors qu’il n’avait encore que 20 ans.


    Il a participé aux combats en Franche-Comté, Vosges, Alsace et sur le massif de l’Authion en Alpes-Maritimes, en tant que tireur au fusil- mitrailleur dans le BM 21 - CA (Bataillon de Marche 21 Compagnie d’Accompagnement),

    Il fut démobilisé le 13 février 1946. Pendant sa période au sein de la Division Française Libre, il a noté, dès qu’il pouvait sur un cahier son ressenti. 

    J’ai eu en ma possession après le décès de mes parents, des documents et ce journal qui m’a permis de connaître cette partie secrète de la vie de mon père. Il n’en parlait pas ou très peu comme beaucoup d’entre eux.

    J’ai voulu savoir la raison de ce silence. Je me suis donc mis à marcher sur ses pas: les pas du BM-21. Durant mes recherches, j’ai pu rencontrer des gens formidables, qui, comme moi, cherchaient à comprendre. Nos recherches et nos points de vue se sont alors croisés, ce qui à fait de cette recherche une expérience extraordinaire.

    C’est pour cela que je désire partager les écrits de mon père afin de participer au Devoir de Mémoire, faire connaître ces combats oubliés et surtout pour la reconnaissance et le respect envers ces jeunes combattants qui ont cru à la Liberté et qui pour beaucoup y ont laissé la vie.

     Christian MARTEL



     1 - Les Vosges (Automne 1944)

     

                            

     2 - La Libération du territoire de Belfort (Automne 1944) 

     

     

    3 - De Masevaux au Front de l'Atlantique et retour... (Novembre-Décembre 1944)

     

     

    4 - Combats en Alsace (Janvier - Mars 1945)

     

     

    5 - Derniers combats à l'Authion  (Printemps 1945)

     

    6 - Le 8 Mai 1945 en Italie...


     

    Conclusion

    Après sa démobilisation, je présume que son retour à la vie civile n’a pas du être facile car dans les villes et villages, au fur et à mesure de leur libération, la vie avait repris son cours. Tous ces jeunes livrés à eux-mêmes n’ont sans doute pas été reçus comme des héros

    Un ancien que j’ai rencontré, m’a dit que lorsqu’il a recherché du travail, un habitant de son village lui a dit « je n’ai pas de travail à te proposer, le village était libéré, tu n’avais qu’à pas y aller »

    Après avoir connu la dure vie du combattant, la solidarité et l’esprit de camaraderie entre frères d’arme, il fallait reprendre une vie normale, retrouver du travail, reprendre le rythme de tout un chacun.

    Mon père a réussi comme beaucoup d’anciens à revivre, retravailler et fonder une famille en faisant semblant d’oublier ce qu’ils avaient vécu, la perte de copains et voir la mort de près.

    Je pense qu’ils ont du en faire des cauchemars durant leur vie.

    Apres avoir lu son cahier de marche, j’ai commencé à faire mes recherches.

    Lire des livres d’anciens de la DFL sur lesquels je pouvais croiser des scènes identiques aux écrits de mon père.

    J’ai rencontré Pascal Vanotti qui effectué également les mêmes recherches puisque par le plus grand des hasards nos pères ont combattu côte à côte, affectés en octobre 44 à la CA du BM 21

    Lorsque son père, Jacques Vanotti a eu le journal de papa en main il m’a dit :« C’était bien cela ne le garde pas pour toi, montre le !»

    Monsieur René Bausseron, ancien du BM11, me confirma également le coté extraordinaire du journal.

    Après avoir eu la chance de rencontrer des personnes comme Florence Roumeguere, Blandine Bongrand Saint Hillier et Brigitte Pefferkorn, j’ai participé aux différents articles du blog sur les combats de l’Authion.

    Depuis tout cela, j’ai quelques phrases de mon père qui me sont revenues :

    « J’étais entouré de deux camarades, il y a eu une explosion, ils sont mort tous les deux » (je pense que cela c’est passé le 14 janvier)

    « Il fallait prendre un camarade blessé sur le dos et je sentais son sang et ses intestins coulés dans mon cou » (je suppose que cela correspond à partir du 5 avril sur Pezurbe)

    « A mon retour, j’ai eu du mal à me réhabituer à dormir dans un lit »

    Quelques indications :

    Presque tous les hivers, mon père avait des problèmes aux pieds, il disait au médecin que c’était suite aux pieds gelés

    Je pense que d’autres me reviendront !!

    Voilà, je pense que nous, descendants, enfants ou petits enfants ; nous avons une histoire à raconter, à faire connaitre, à partager.

    Si vous avez des documents, des photos, des écrits ou des anecdotes, le blog  est là pour cela.

    Nous devons participer au Devoir de Mémoire en hommage à nos anciens.

    Une petite histoire méconnue qui doit être reconnue dans la Grande Histoire.

                                                         Christian Martel

     


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