• *Honneurs funèbres militaires rendus au professeur Guy Charmot Compagnon de la Libération


     Eloge funèbre 

     

    Les honneurs funèbres militaires lui ont été rendus sur le parvis de l’Église Paroissiale Saint-Giniez à l'issue de la cérémonie religieuse.



    * Funérailles de Mr le professeur Guy Charmot - Compagnon de la Libération

     (photo ordre de la Libération) 

    Eloge funèbre prononcé par le Délégué national de l’Ordre de la libération à l’occasion des honneurs funèbres militaires rendus au professeur Guy Charmot, Compagnon de la Libération. *


    A Marseille le 11 janvier 2019

     

    *Honneurs funèbres militaires rendus au professeur Guy Charmot   Compagnon de la Libération

    (photo ordre de la Libération) 

     

    Madame Dominique CHARMOT-BENSIMON

    Monsieur le préfet,

    Mesdames et messieurs les élus,

    Mon général,

    Mesdames et messieurs en vos rangs, grades et qualités,

    Mesdames et messieurs,

     

    Les Compagnons de la Libération du dernier carré Daniel Cordier, Hubert Germain et Pierre Simonet m’ont chargé de vous dire qu’ils sont en ce moment avec nous par la pensée. J’ai également informé le Compagnon Edgar Tupët-Thomé, qui ne s’exprime plus, de cette cérémonie d’honneurs funèbres militaires.

     

    Dans ses Mémoires de Guerre, le général de Gaulle évoque par les mots suivants sa situation au mois de juin 1940 : "Quant à moi, qui prétendais gravir une pareille pente, je n'étais rien, au départ. A mes côtés, pas l'ombre d'une force, ni d'une organisation. En France, aucun répondant et aucune notoriété. A l'étranger, ni crédit, ni justification. Mais ce dénuement même me traçait ma ligne de conduite."

    Seul ? ...Il ne l’était pas tout à fait, car quelques français, une poignée, trop peu à l’évidence, le ralliaient à Londres dès juin depuis la métropole, tandis que d’autres, comme le médecin-lieutenant Guy Charmot, éparpillés de par le monde, refusant également cet armistice, allaient également se démener pour rejoindre le plus rapidement possible les Français Libres, après des périples très divers.

    Ces braves de la première heure, qu’ils l’aient ou non entendus, adhéraient tous, en fait, à l’appel du 18 juin du général, en particulier à l’extrait suivant : « Mais le dernier mot est-il dit? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non ! […] Quoi qu'il arrive, la Flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas ».

    Et Guy Charmot, jeune médecin-lieutenant d’active, à qui nous disons aujourd’hui au revoir, refusant viscéralement la défaite et l’écroulement de sa patrie, a fait partie de ces quelques « volontaires de l’Aube », de ceux qui, instantanément et sans jamais calculer, ont pris le risque de tout quitter et de tout perdre, sauf l’honneur, à un moment où était tombée sur la France l’obscurité froide et sinistre de l’Occupation.

    Oui, il fallait en juin 40 un patriotisme chevillé au corps et une foi transcendante dans l’avenir des peuples tombés sous le joug de l’Allemagne nazie et de l’Italie fasciste, pour s’engager auprès du général de Gaulle, général à titre temporaire, en rupture de ban, quasi inconnu et de plus pratiquement sans troupe, et lier son destin à celui de la France Libre, qui n’était alors qu’une abstraction.

    Mais Guy Charmot est porté par son refus de se soumettre.  Né le 9 octobre 1914 à Toulon, au début de la première guerre mondiale, il reçoit une solide éducation civique et patriotique de la part de ses parents.

    Il entre en 1934 à l'École du service de santé militaire de Lyon. Très jeune, il est attiré par une carrière dans le service de santé des troupes coloniales, en particulier par l’activité d’assistance médicale indigène, car les colonies sont à l'époque synonymes d'aventures. En octobre 1937, il devient docteur en médecine. En 1939, à la fin de ses études, il rejoint l’École d’application du service de santé des troupes coloniales à Marseille, au Pharo. En juin 1940, il est en poste en Afrique.

    N’ayant pas entendu l’appel du général de gaulle mais submergé par la honte de l’armistice, il décide de continuer le combat comme il le raconte : « J’étais dans le nord-ouest de la Côte d’Ivoire, quand nous avons appris la déroute française, notre premier sentiment a été la stupéfaction puis l’indignation et la honte pour l’armée et la France !

    J’ai traversé la Volta sur une pirogue avec mon vélo dessus car notre but était de continuer le combat au côté des anglais. On était une dizaine à vouloir former un groupe avec une cinquantaine de jeunes tirailleurs. Deux mois plus tard nous avons rejoint le Cameroun qui, sous l’impulsion décisive de Leclerc, venait de se rallier à de Gaulle ».

    Guy Charmot est affecté comme médecin au Bataillon de Marche n°4 (BM 4) dès sa formation, et il recevra son baptême du feu rapidement. Je lui laisse la parole : « Notre premier combat a eu lieu en novembre 40, pour rallier le Gabon à notre cause. Leclerc et Koenig ont décidé d’intervenir au Gabon par la terre. On a été mitraillé, et un officier a été tué dans mes bras. J’ai opéré toute la nuit. Un bruit a couru qu’un médecin de l’hôpital n’a pas voulu opérer un de nos hommes. Leclerc a demandé qu’on le fusille immédiatement mais je suis allé plaider sa cause et je lui ai ainsi sauvé la vie. Nous sommes revenus à Douala d’où nous sommes partis pour rejoindre le Liban ».

    Il participera par la suite, avec son cher BM4, et jusqu’à la victoire finale, à toute l’épopée de la 1ère division Française Libre que ce soit dans les combats de Syrie ou ceux en Ethiopie ou encore en Libye

    Ce seront, par la suite, les combats de Tunisie, où Guy Charmot fera preuve de beaucoup d'activité, de courage et de dévouement. Puis viendront les durs combats de la campagne d’Italie où le médecin Charmot se distingue particulièrement au cours des combats des 17 au 20 mai 1944. Je le cite : « Nous sommes arrivés en Italie après le gros du corps expéditionnaire français. On a combattu de nuit contre les Allemands. Les Italiens nous ont accueillis en libérateurs. On a perdu 400 de nos hommes soit plus de la moitié. J’étais le plus près possible du front pour les traitements d’urgence comme les piqûres de morphine. Pendant les trois premiers jours, j’ai passé deux nuits sans dormir. Jusqu’à la fin, la campagne d’Italie a été très dure. J’ai failli mourir juste après la bataille de Monte Cassino ».

    Son comportement admirable lui vaudra de recevoir la croix de la Libération des mains mêmes du général de Gaulle le 30 juin 1944 à Marcianise.

     

    ***

     

    Le général de Gaulle, en créant l’Ordre de la Libération par l’Ordonnance du 16 novembre 1940, a voulu récompenser, je cite : « les personnes ou les collectivités militaires et civiles qui se seront signalées dans l'œuvre de la libération de la France et de son Empire ».

    Pour être nommé Compagnon de la Libération, il fallait satisfaire à des critères très stricts qui prenaient en compte : l’engagement précoce dans la France libre ou dans la Résistance, des conditions de ralliement difficiles, la prise de risque et une somme d’actions marquantes et répétées souvent sanctionnées par la mort. En effet, un tiers des Compagnons tomberont au combat ou dans l’action clandestine, et la plupart seront meurtris dans leur chair.

    Ils ne seront, du fait de cette sélection drastique, que 1038 à être faits « Compagnon » et à faire partie, selon les mots du général, de cette « chevalerie exceptionnelle créée au moment le plus grave de l'histoire de France ».

    Guy Charmot relate ainsi la fin de son aventure de Français Libre : « La libération de Paris, on l’a apprise en Italie. Puis ce fut le débarquement à Cavalaire, dans la soirée du 16 août 1944, et la campagne de France, avec de durs combats dans les Vosges et en Alsace, pour terminer sur la frontière italienne. J’avais été légèrement blessé devant Toulon.

    Pour moi, deux souvenirs restent particulièrement marquants : cette matinée ensoleillée de juin 1944 en Italie où, sur le front des troupes, seul du BM4, j’ai reçu la Croix de la Libération des mains du général de Gaulle, et le soir du Débarquement où j’ai retrouvé l’odeur des pins de mon enfance. Le but de mon engagement pour la libération de la France était atteint. Le jour même de l’armistice, j’ai signé ma demande de départ colonial, impatient de retrouver ma vocation de servir dans le cadre de l’assistance médicale indigène, tout d’abord en brousse. Puis ce fut la voie des concours, une autre vie ».

    ***

     

    Monsieur le professeur Charmot, vous avez fait partie de cette « aristocratie de la première heure », et vous êtes parmi les rares à avoir participé à l’ensemble de l’épopée de la France Libre. 

    Guy Charmot, aujourd’hui devant vous, devant votre famille et devant ceux qui sont venus vous dire au revoir, il est important de rappeler, que les Compagnons de la Libération symbolisent le fait, que des françaises et des français, et souvent très jeunes, aux heures les plus sombres de notre histoire, guidés par le sens de l'honneur et du devoir, ont fait preuve d’abnégation, d'héroïsme et de sacrifice dans la lutte qu'ils menèrent pour redonner à notre Patrie sa liberté, son indépendance et son honneur.

    Ils ne furent pas évidemment pas les seuls, et la présence en ce jour de votre frère d’Armes le colonel Robedat, qui nous relaté des moments émouvants communs le rappelle. D’ailleurs, André Malraux, lui-même Compagnon, précise : "Il faut proclamer, répéter que l'Ordre de la Libération n'est pas formé d'hommes qui se sont séparés des autres par leur courage, mais bien d'hommes à qui leur courage a donné la chance de représenter tous ceux qui, le cas échéant, n'avaient pas été moins courageux qu’eux. L’Ordre n'est pas une hiérarchie dans la Libération. Il est le symbole de la Libération".

     

    Guy Charmot après avoir bravement servi les armes de la France, vous continuerez à servir la cause de l’humanité en la soignant, comme médecin des Hôpitaux d'Outre-mer puis professeur agrégé du Service de Santé des Armées, effectuant de nombreux séjours en Afrique jusqu'en 1965, puis en vous spécialisant dans la recherche en médecine tropicale, ce qui vous vaudra d’être élu, en 1994, membre de l'Académie des Sciences d'Outremer.

    Guy CHARMOT vous nous avez quitté le sept janvier 2019 au petit matin, dans votre 105ème année, nous disons à votre famille, et à vos proches qui vous entourent et vous pleurent en ce jour, et à qui nous adressons toutes nos condoléances, qu’ils peuvent être légitimement fiers de posséder un véritable héros dans leur patrimoine familial ou amical.

    Monsieur le professeur Guy Charmot, Grand Officier de la Légion d’Honneur, Compagnon de la Libération, vous avez mérité de la France et vous pouvez dormir du juste sommeil du brave. 

    Nous nous inclinons avec respect devant vous en ce jour d’au revoir, et votre trace ne s’effacera pas, car une nation se nourrissant de vies exemplaires, conformément aux vœux des Compagnons et à la volonté des autorités, l’Ordre est devenu un lieu de sensibilisation civique, une boussole de citoyenneté, afin que vos engagements immédiats, désintéressés et sans concessions pour combattre l’inacceptable, soit une source d’inspiration pour chacun d’entre nous à un moment où de nouveau l’inacceptable frappe notre pays.

     

    Général Christian Baptiste

    Délégué national de l’Ordre de la Libération.

     

    * Funérailles de Mr le professeur Guy Charmot  Compagnon de la Libération

     

     

     


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